jeudi 4 octobre 2012

Pour un plan de développement de l’économie numérique

Depuis les élections présidentielles et la nomination de Fleur Pellerin comme Ministre de l’Economie Numérique on voit revenir l’idée d’un plan coordonné de développement. L’idée est séduisante. En effet, en informatique, la France est en retard sur les autres pays comparables. Comme le fait apparaître le classement du Forum de Davos la France est au 20ème rang loin derrière la Suède, Singapour, la Finlande, la Suisse, les Etats-Unis,… Un peu après l’Allemagne, la Grande-Bretagne et le Japon (Voir sur ce blog le message du 19 Mars 2012 : « Le classement informatique duWorld Economic Forum : une triste réalité »). Or les enjeux du numérique sont considérables.
Ceci dit ce n’est pas le 1er plan pour le développement de l’économie numérique. En 2008 Eric Besson, alors secrétaire d’Etat chargé de la prospective de l’évaluation des politiques publiques et du développement de l’économie numérique, avait établi un plan d’action qui devait donner une nouvelle impulsion au secteur (Voir sur ce blog le message du 14 Janvier 2012 : « Besson, le retour : le nouveau plan de développement de l’économienumérique (2012-2020) »). Au total il proposait 154 mesures. On allait voir ce qu’on allait voir. La croissance était à portée de main. Malheureusement les résultats, sans être nuls, ont été assez modestes.
Le plan Besson a déçu. Ceci est probablement dû au fait qu’il était, en grande partie, à côté du sujet et proposait de nombreuses mesures ponctuelles qui n’ont pas eu d’effet global. Il était issu du rapport d’Attali sur la croissance qui fixait quelques orientations intéressantes. Malheureusement il n’est pas allé au bout de la réflexion sur l’économie numérique. Malgré son insuccès le rapport Besson a eu en 2011 une suite mais elle n’a pas eu le temps d’être appliquée. On ne peut que constater que les mesures proposées étaient très loin du sujet.
A la suite de ces deux malheureux plans qui n’étaient que des collections de mesures sans perspectives il est à craindre que l’opinion se lasse de ces gesticulations sans actions significatives. Cependant les professionnels du secteur demandent que des initiatives publiques soient prises (Voir sur ce blog les messages du 3 Février 2012 : « Le développement économique selon les éditeurs de logiciels » et du 21 Février 2012 : « Les vœux-pieux et lesdouces illusions du Syntec Numérique »). De même les principaux candidats à la présidentielle ont fait des propositions (Voir sur ce blog le message du 22 Avril 2012 : « Economie Numérique : 5 candidats à la présidentielleont parlé »). Il est nécessaire de faire quelque chose car la situation est grave. Cependant il doit éviter de s’enliser dans des problèmes confus et de peu d’intérêt comme le sort de l’Hadopi ou le financement du Très Haut Débit (Voir sur ce blog le message du 15 Avril 2012 : «Economie numérique : les silences de la campagne»).

Faut-il établir un plan ?

Dans ces conditions on peut s’interroger sur la manière d’agir. Faut-il définir et mettre en place un plan et prévoir une intervention publique ou faut-il laisser les entreprises agir librement en espérant que le meilleur gagne ? Curieusement en France on veut les deux : un libéralisme de façade et par derrière une solide intervention publique pour aider les entreprises françaises. Ce n’est pas nouveau. Depuis 40 ans l’Etat n’arrête pas d’intervenir dans le secteur de l’informatique et des communications avec des résultats contrastés, faibles, voir contre-productifs.
Résultat : parmi les 50 premières entreprises technologiques mondiales (voir le classement paru dans Wikipédia en anglais : « List of the largest technology compagnies ») il n’y a que trois entreprises françaises : le 1er est en 19ème position : c’est France-Telecom, la 31ème est Vivendi et 50ème est Alcatel. Si on calcule le chiffre d’affaires cumulé des 200 premières entreprises la France se classe en 7ème place avec un chiffre d’affaires de 166 milliards de dollars. (Voir sur ce blog le message du 18 Juillet 2012 : « Le développement des entreprises technologiques »). Ce n’est pas une catastrophe mais ce n’est pas brillant. On peut penser qu’au prix de quelques efforts la France pourrait passer du 7ème au 4ème rang en passant de 166 à 200 milliards de dollars de chiffre d'affaires comme l’Allemagne.
On aurait pu espérer que les PME suppléent aux carences des grandes entreprises. On aurait pu imaginer un grand nombre d’entreprises dynamiques permettant de préparer l’avenir. Mais, avec la meilleure bonne volonté, on a du mal à trouver quelques entreprises de logiciel ou de matériel françaises ayant un succès international en dehors de Catia. Mais peut-on considérer que Dassault Système soit vraiment une PME ?
Dans ces conditions il est difficile de choisir les démarches les plus efficaces pour repositionner la France dans la course au développement de l’Economie Numérique.

Faire des choix clairs et adaptés

Quand on est face à ce type de situation, la première réaction est de mettre en place un plan. Contrairement à une idée souvent répétée un plan n’est pas un outil de prévision de l’avenir ([1]) mais un moyen d’organiser les actions dans le temps. Pour y arriver il est nécessaire de se fixer des objectifs, de se mettre d’accord sur leur contenus, de définir les dispositifs à mettre en œuvre, identifier les actions à entreprendre et de dégager les moyens nécessaires.
La première étape consiste à faire des choix, c’est-à-dire de fixer des priorités Cela ne consiste pas à faire des annonces du type : « Demain vous aurez tout ce que vous rêvez d'avoir ». Faire des choix, cela consiste à dire : « ça je vais le faire et ça je ne le ferais pas ». Les deux plans Besson n’avaient pas clairement fixés des priorités et ceci explique peut-être leur faible impact.
Dans notre domaine il est nécessaire de choisir les produits, les services, les technologies, les partenariats, les marchés recherchés, les types de clients à atteindre,… Il est nécessaire d’arrêter de miser des sommes importantes sur des technologies mortes et financer des développements ou des services qui n’ont pas de clients. 
Une fois ces choix effectués, pour bâtir un plan efficace, il est nécessaire de statuer dans cinq points clés :
·       Fixer les rôles des différents intervenants. Il est d'abord nécessaire de les identifier puis, ensuite, de préciser leurs rôles et leurs responsabilités. Il est de même important de fixer des investissements et de dégager leur financement. Très souvent ces stratégies reposent sur des partenariats. Il faut définir les types d'accord, choisir les partenaires et détailler des règles de concertation. 
·       Mettre en place des dispositifs de travail adaptés. Pour qu’un plan d’action se mette en place il est nécessaire de définir des instances de pilotage et de coordination. On doit s'attacher à mettre en place des dispositifs de travail réactifs. Souvent, la multiplication des instances se traduit par un ralentissement des décisions, voir l’absence de décision. Or, il est vital d’être réactif.
·       Communiquer sur le plan d’action. Pour réussir il est important d’informer largement l’ensemble des parties prenantes sur les objectifs, les orientations, les choix, les moyens,… du contenu du plan d’action arrêté. Mais il est aussi très important de communiquer sur les résultats obtenus.
·       Assurer un suivi des opérations. Une fois le plan arrêté il faut s’assurer sa mise en place. Il est pour cela nécessaire de suivre les opérations pour s’assurer qu’elles sont lancées et réalisées à temps. Un tableau de bord doit être périodiquement établi et soumis à un comité de pilotage chargé du suivi du plan d’action.    
·       Financer le plan d’action. Des investissements importants sont conséquents. Le plan doit prévoir leur financement. Il reposent, pour l'essentiel, sur des fonds publics et des avantages fiscaux (les fameuses niches fiscales). Très souvent on mise sur le financement par le venture-capital mais l’expérience montre qu’il est rare en France. Ces organismes financent plutôt la reprise d’entreprises moyennes et grandes. Il est aussi possible d'envisager de faire financer une partie du plan par les entreprises qui en profite, mais ce tte solution n'est pas toujours acceptées par les intéressés.
Fautes de mise en place de ces différents dispositifs il est possible qu'il ne se passe par grand-chose. Car la pente naturelle des entreprises françaises en matière d’économie numérique est d’attendre. Dans ces conditions la position de la France risque de continuer à se dégrader.

Avoir une vision stratégique

La réussite d’un tel plan d’action nécessite d’avoir une vision stratégique. Pour réussir le développement de l’économie numérique il est indispensable d’avoir une vision claire de l’évolution des technologies informatiques et de la communication. C’est un sujet complexe et délicat car il est toujours difficile de prévoir les tendances à venir.
Actuellement, l’essentiel des débats portent sur la rémunération des ayant-droits ou sur le financement du câblage en fibre optique jusqu’à l’usager. Ce sont des sujets intéressants mais ce n’est pas le cœur de la stratégie de l’économie numérique. Le sort d’Hadopi ou des réseaux THD (Très Haut Débit) sont des points relativement secondaires par rapport aux vrais enjeux stratégiques.
Les deux plans Besson ont souffert de cette absence de vision. Pourtant dans le rapport Attali il y avait quelques constatations intéressantes comme des constatations :

  • « La France investit dans ces technologies deux fois moins que les États-Unis ou la Finlande, ce qui explique, toutes choses égales par ailleurs, notre différentiel de croissance »,
  • « À l’instar des États-Unis, de certains pays nordiques et des nouvelles puissances asiatiques qui ont fait du développement numérique le principal moteur de leur compétitivité et de leur croissance » ([2]).
Il est certain que l’ensemble de l’économie est en train d’être profondément impactée par le développement de l’informatique et des systèmes d’information. L’économie numérique concerne tous les acteurs économiques et tout particulièrement les entreprises. On peut identifier trois impacts majeurs :
·       Le support aux activités de l’entreprise. C’est le domaine classique de l’informatique. Ce sont les applications traditionnelles comme la comptabilité, la paie, la facturation,… Mais ce sont aussi des systèmes plus récents comme la gestion commerciale (CRM), la gestion de la production, la gestion de la logistique (SCM) et, de plus en plus, le commerce électronique. Ces applications ne changent rien à l’activité de l’entreprise mais elles permettent de modifier sa manière de travailler et cela se traduit par des gains de productivité importants.
·       La production de services classiques à l’aide des TIC. On assiste depuis environ 20 ans à la numérisation d’un certain nombre de services. C’est le cas du téléphone. Dans un premier temps on a numérisé le signal puis on l’a transmis à l’aide d’Internet (voix sur IP). Puis cela a été la numérisation de la musique (MP3), de la photo (JPEG), de la vidéo (MPEG 2, la TNT puis la TV sur IP), l’établissement de plans et la simulation (architecture, CAO,…), les cotations boursières, les virements électroniques, le suivi de colis, les catalogues en ligne… On fournit le même service à l’usager mais on le produit et on le délivre de manière plus performante. De plus la numérisation permet de proposer à l’utilisateur de nouveaux services complémentaires.
·       La fourniture de nouveaux produits et services. Mais à côté des anciens services il est possible d’en créer de nouveaux. C’est par exemple le cas de la messagerie. Elle permet de remplacer le courrier interne des entreprises, le télex et la Poste. Mais à partir de cette base de nombreux services ont été développés. Autres nouveaux services : les moteurs de recherche avec une indexation sur l’intégralité des textes, la simulation numérique des nouveaux produits, le partage de documents, les agendas partagés, la téléconférence, … Il existe aussi de nombreux nouveaux produits comme les smartphones, les tablettes, les liseuses, les jeux, les aides à la conduite,…. Demain ce sera peut être la TV connectée.
Une stratégie nationale de développement efficace doit prendre en compte ces trois domaines. Si la politique mise en œuvre ne vise que le développement d’un seul segment l’impact économique risque d’être réduit d’autant.
Dans le cas d’une stratégie de rattrapage, ce qui est notre cas, il est nécessaire de prioriser les efforts dans les domaines où l’économie est la plus faible. Dans le cas de la France le segment le plus fragile est celui des nouveaux produits et services. Il est vital de favoriser les entreprises présentes dans ce domaine et les aider à se développer en saisissant rapidement les opportunités dès qu'elles se présentent.

Cibler quelques secteurs

L’analyse montre que quatre secteurs économiques doivent faire l’objet d’une attention particulière:
·       Secteur technologique. Ces entreprises produisent des matériels, des composants électroniques, des systèmes d’exploitation, des bases de données, des langages, des progiciels, …. Elles assurent aussi des services de développement et d’exploitation. Au cours des vingt dernières années les entreprises françaises se sont en grande partie retirées de ce segment. Le succès d’entreprises coréennes ou chinoises comme Samsung ou Huawei montre qu’il est possible de reconquérir des parts de marché dans un monde très évolutif.
·       Entreprises « classiques » migrant vers le numérique. Elles intègrent des produits et des services basés sur les technologies dans leurs produits et leurs services. C’est, pas exemple, le cas de l’automobile ou l’aviation. De plus en plus de fonctions sont pris en compte et surtout de nouveaux services se développent. Ces innovations sont réalisées par les bureaux d’études et suscitées par les services marketing de ces entreprises. Ces développements se font, très souvent, indépendamment des services informatiques internes. Les "pures players" ne sont qu'un sous ensemble de ce segment. Le fait qu'ils n'aient pas de boutiques ou d'agences n'empêchent pas qu'ils soient des entreprises comme les autres avec des activités de production et de commercialisation. Par contre ces entreprises ont des comportements particuliers qu'il faut prendre en compte.
·       Entreprises utilisatrices. Toutes les entreprises achètent des produits ou des services technologiques et les utilisent pour assurer leur fonctionnement. Ce sont des serveurs, des PC, des systèmes d’exploitation, des bases de données, des progiciels, des ERP,… Ces achats et la mise en œuvre de ces matériels et de ces logiciels sont assurés par les services informatiques. Mais de plus en plus de produits et de logiciels sont achetés directement par les unités opérationnelles et même par les personnes.
Il est évident que les attentes et les comportements de ces trois secteurs économiques ne sont pas les mêmes. Une stratégie de développement doit être basée sur la prise en compte de ces trois cibles. C’est un enjeu fondamental. Toutes les mesures qui ne correspondent pas à ces attentes ont peu de chance de réussir.

Dégager une démarche globale

Il est important d’éviter de lancer des mesures ponctuelles qui ne mènent à rien. Elles sont souvent le moyen de distribuer des subventions qui finalement débouchent sur de faibles résultats. Les investissements publiques dans le Cloud, les « serious game », le DMP ([3]) ou le Très Haut Débit risquent d’être des dépenses qui ne débouchent sur rien. De même il est important d’éviter la distribution d’avantages fiscaux sans impact significatifs ou de créer des organismes bidons qui coûtent chers et ne servent pas à grand-chose.
Il faut prendre des mesures efficaces permettant réellement de développer l’économie numérique (Voir sur ce blog le message du 15 avril 2012 : « Economienumérique : les silences de la campagne » ([4])) : 
1.     Faire baisser les coûts des télécommunications. La France souffre actuellement de  prix anormalement élevés. Ceci est bon pour les résultats financiers des opérateurs mais cela freine le développement des applications numériques. C’est un facteur clé de la compétitivité. Il serait nécessaire de les réduire tous les prix de moitié pour arriver au niveau des autres pays développés (voir sur ce blog du 19 Mars 2012 : « Leclassement informatique du World Economic Forum : Une triste réalité »). L’initiative de Free Mobile va dans le bon sens mais il y a encore une marge importante avant d’arriver à une situation réellement satisfaisante.
2.     Améliorer le contexte administratif et réglementaire. D’après l’étude du World Economic Forum sur le développement de l’informatique c’est le second facteur expliquant le positionnement médiocre de la France en matière numérique. Il est certain qu’il est nécessaire de simplifier et d’accélérer la création d’entreprise, de faciliter les possibilités de recours judiciaires commerciales, d’alléger les procédures fiscales et réglementaires pour les PME,… Ces différentes mesures concourrent directement à la compétitivité des entreprises. Des progrès ont été réalisés dans ce domaine mais il reste encore beaucoup d’efforts à faire dans ce domaine.
3.     Inciter les entreprises moyennes et grandes à investir dans les TIC. De nombreux acteurs du secteur misent sur le développement par les PME et des jeunes pousses innovantes. Il existe une véritable croyance sur le rôle positif des « start-up ». C’est une illusion couramment répandue. L’observation montre que depuis de nombreuses années que les PME françaises sont faibles et contribuent peu à la croissance de l’économie numérique. On a beaucoup de mal à trouver en France des entreprises comme Google, Apple et Amazon. En règle générale les petites entreprises investissent peu car elles ont du mal à trouver des financements, font peu de recherche-développement car elles ne sont pas incitées à le faire et globalement elles ne jouent qu’un rôle marginal dans le développement de l’économie numérique. En fait le développement de l’économie numérique est actuellement pour l’essentiel assuré par de grandes entreprises, voir de très grandes. Il est nécessaire de redynamiser les moyennes entreprises et d’aider les petites entreprises à investir dans l’informatique et l’économie numérique. En attendant il est nécessaire de miser sur le rôle des grandes entreprises.
4.     Favoriser les capacités des entreprises à l’exportationDans le secteur informatique les exportations sont une des clés du succès car le marché est mondial. Or, les entreprises françaises du secteur de l’informatique sont traditionnellement sont peu orientées vers l’exportation. Celles qui réussissent sont plutôt des moyennes et de grandes entreprises notamment les sociétés de services. Les PME du secteur notamment les quelques fabricants, les éditeurs et les nombreuses sociétés de services sont peu orientés vers l'exportation. Pour développer les entreprises du secteur il est nécessaire de se baser sur des coopérations entre les entreprises. Les grandes entreprises industrielles et commerciales doivent intervenir et aider les PME du secteur de l’économie numérique à développer leurs exportations.
5.     Améliorer le Crédit Impôt Recherche (CIR). Ce dispositif est très utile car il a favorisé le financement les efforts de recherche des entreprises. C'est un montant de l'ordre de 5 milliards d’euros. C’est considérable mais on constate que le pourcentage global de R&D par rapport au chiffre d’affaires n’a pas sensiblement évolué grâce au CIR. Il est possible qu’il y ait un effet d’aubaine. On ne peut pas l’empêcher. Cependant il faut éviter les dérives possibles. Pour cela on doit renforcer les dispositifs de contrôle et notamment en auditant une sélection de dossiers des opérations de recherche effectuées. Dans notre secteur il est surement souhaitable d’élargir le périmètre du CIR de façon à prendre en compte les développements informatiques et notamment la réalisation de progiciels ou de logiciels qui sont ensuite intégrés dans les produits.
6.     Amortissement des études informatiques internes. Dans la plupart des entreprises les études informatiques sont comptabilisés comme des charges de l’exercice. Résultat : au cours de l’année ou des années où on réalisée le développement l’entreprise supporte des charges élevées qui pèsent sur ses résultats. Or la réglementation fiscale autorise l’amortissement de la réalisation des réalisations mais les entreprises ne le font pas. Il serait souhaitable d’inciter les entreprises à amortir les logiciels. Il serait aussi intéressant d’élargir le domaine d’amortissement à la conception de la future application, au pilotage du projet et aux tests. Il serait souhaitable d’aller plus loin en proposant un dispositif de crédit impôt logiciel analogue au crédit impôt recherche.
7.     Inciter les entreprises à appliquer la gouvernance informatique et la gouvernance des systèmes d’information. C’est un enjeu important. Les pratiques constatées dans les entreprises françaises sont encore très éloignées de celles préconisées par des référentiels comme CobiT, ITIL, CMMI, PMBoK,… De nombreux signes prouvent la fragilité de la maîtrise des systèmes d’information : dérive élevée des projets, difficulté de faire baisser les coûts des prestations informatiques, faiblesse de la sécurité des systèmes d’information,…Pour améliorer la situation actuelle il est souhaitable d'inciter les entreprises à auditer régulièrement la fonction informatique, les principaux projets et les grands systèmes d’information. De même il faut inciter les entreprises à renforcer leur dispositif de pilotage et de planification de l’informatique.
8.     Formation des décideurs et des managers aux TIC. La plupart des dirigeants, des managers, des maîtres d’ouvrage,… n’ont qu’une idée très imparfaite de l’informatique et des systèmes d’information. Au cours de leurs études ils ont acquis quelques notions informatiques et effectués un peu de programmation mais en réalité ils ont des idées très floues sur la gestion de projet et l’architecture techniques. Comme ils savent se servir de Word et Excel ils pensent avoir les compétences nécessaires pour apprécier les enjeux et choisir les stratégies à mettre en œuvre. Il est souhaitable de renforcer les connaissances des décideurs et des managers dans le domaine des technologies numériques.
9.     Formation des chefs de projets. La plupart des chefs de projets sont des autodidactes de la gestion de projet. Généralement ils ont suivi un cours sur la gestion de projet de deux ou trois jours puis ensuite ils se sont lancés dans le grand bain. En fait ils apprennent de l’expérience. C’est intéressant mais c’est notoirement insuffisant. Etre un chef de projet est un vrai métier. Pour l’exercer correctement il est nécessaire d’avoir une formation solide comme, par exemple, un an de formation au niveau master. Tant qu’on confiera les projets à des apprentis il ne faut pas s’étonner des taux d’échecs élevés et des dérives importantes constatées.
10.  Communiquer sur l’impact des TIC. Le domaine de l’économie numérique connait de nombreux succès même en dehors des Etats-Unis. En France, en Europe et dans le reste du monde il existe de très nombreuses applications ayant un impact économique important se traduisant par un développement économique significatif. Malheureusement ces cas sont peu connus et on revient toujours sur les quelques success story américaines comme Google, Apple, Amazon,… Or il existe en Europe et en France de très belles réussites. La presse économique et informatique se contente, la plupart du temps, de reproduire les communiqués de presse des grands fournisseurs et effectue peu d’enquêtes sur le terrain.
Ces mesures sont simples et dans l’ensemble peu coûteuses. Il faut sensibiliser et animer sur le thème de l’économie numérique. L’objectif est de renforcer l’attitude des décideurs envers l’économie numérique afin de développer les bons usages des Technologies de l’Information et des Communications en faveur de la croissance de l’économie numérique et plus généralement de la croissance économique.


[1] - Le but du plan n’est pas non plus un outil permettant de décider cinq ans avant et dans le détail tout ce que doit faire chaque entreprise. Le temps de Gosplan est révolu.
[2] - Rapport de la Commission pour la libération de la croissance française, page 55
[3] - DMP : Dossier Médical Personnalisé.
[4] - Extrait du message « Economie numérique : les silences de lacampagne » de ce blog du 15 avril 2012 « Ce sont les cinq orientations suivantes :
1.      Faire baisser les coûts des télécommunications. Elles sont notablement plus élevées en France que dans les autres pays développés et explique en partie le médiocre positionnement de notre pays dans le classement NRI, le Networked Readiness Index, du World Economic Forum de Davos. Il montre qu’il existe un « gap » important en ce domaine et qui freine le développement de l’économie numérique. Il est certain que la récente offensive de Free Mobile va dans le bon sens mais il y a encore du chemin à parcourir.
2.      Améliorer le contexte administratif et réglementaire. Ce terme recouvre de nombreux points différents signalés par l’étude du World Economic Forum  et qui met en évidence un certain nombre de fragilités structurelles de l’Etat français.  Depuis de nombreuses années les entreprises françaises et notamment les PME souffrent de ce contexte lourd et peu efficace. Le défaut de compétitivité de ces entreprises est, en grande partie, dû à ces insuffisances.
3.      Inciter les entreprises à investir dans les TIC. L’informatique n’a pas une bonne image. De nombreux dirigeants pensent que c’est un coût sans contrepartie. Ils sont toujours réticents à effectuer des investissements sans contrepartie. Cette situation paradoxale est probablement due au fait que trop de projets ont un impact trop incertain sur la capacité des entreprises à créer de la valeur. Mais c’est surtout dû à leur faible connaissance de l’économie numérique.
4.      Formation des décideurs et des managers à la mise en œuvre des TIC. Les maitres d’ouvrage et les maitres d’œuvre n’utilisent pas les mêmes termes, les mêmes démarches et les mêmes concepts. Il est indispensable qu’ils parlent le même langage, qu’ils maîtrisent les concepts de gestion de projet, de pilotage de l’activité informatique et plus généralement qu’ils aient une réelle maîtrise des systèmes d’information.
5.      Mieux communiquer sur les résultats des TIC. Il existe en France de nombreuses « success story » liées à la mise en œuvre de l’informatique, mais elles sont souvent ignorées. De plus il existe dans le monde de nombreuses applications intéressantes. Pour éviter ce type de situation il serait souhaitable de mieux les faire connaître ces réussites au management des entreprises, aux politiques et aussi au grand public. »